Jeudi 29 octobre
Aujourd'hui, notre synopsis se précise
un peu. Nous commencerons par une mise en situation, une rapide
présentation des lieux et de l'équipe de Philippe Maestrati avant
de passer par chacune des étapes qui mènent à la découverte d'une
nouvelle espèce.
En l'occurence, nous étudierons le cas d'Hemilienardia ocellata, un petit mollusque d'environ 5mm, trouvé
assez fréquemment dans l'océan Indo-Pacifique, mais qui, selon des
analyses moléculaires très récentes et pas encore publiées,
englobe vraisemblablement plusieurs espèces différentes.
Hemilienardia ocellata |
Sebastien, un collègue de Philippe
Maestrati, débordé ce jour là, interviendra en interview pour nous
parler de la mise en place des expéditions. Nous pourrons également
interviewer en anglais, un de leur collaborateur Russe, membre de
leur vaste réseau d'amateurs, qui consacrent, à chaque retour
d'expédition, de longues heures à l'étude des spécimens
collectés.
Ce jour-là, Philippe nous raconte en
détails comment se déroule une expédition et nous propose de
visionner ce petit reportage consacré à une de leurs expéditions les plus récentes :
Ils peuvent partir à une cinquantaine
de personnes, les plus polyvalentes possibles, des amateurs, des
professionnels, des plongeurs, des pilotes, des étudiants... Les
nationalités sont diverses et nombreuses. Ils font appel aux
volontaires de la région, qui connaissent souvent très bien la
faune et la flore rencontrée. Ils font à présent aussi appel à un
médecin, pour intervenir en cas de blessures sur le terrain.
Sur place, leur emploi du temps est
chronométré et défini chaque soir pour le lendemain. Les récoltes
se font de jour comme de nuit, et chacun doit tenir le poste qui lui
a été attribué. Les jours de repos sont rares, car l'expédition
coûte très cher et chaque jour sur le terrain est précieux. Malgré
le dur labeur sur place, les expéditions restent la partie la plus
passionnante de ce métier, nous confie-t-il.
Un premier tri, effectué sur place,
permet de séparer les mollusques des crustacés et des algues, puis
les récoltes sont ramenées en France. Avant 2004, ils ne
récupéraient que les mollusques, mais devant l'énorme gâchis que
représentait la perte de tous les autres organismes, des mesures ont
été prises pour collaborer avec d'autres professionnels afin de
récolter également les crustacés et les algues.
Souvent, leurs expéditions sont
suspectées d'abîmer la biodiversité. Il n'en est rien. Leurs
récoltes représentent, dans l'immensité du milieu où elles ont
lieu, l'équivalent d'une pincée de matériel prélevé par-ci
par-là dans une grande maison. Leur impact sur l'environnement est
quasiment nul.
P. Maestrati observant des spécimens à la loupe binoculaire |
Au terme de cette passionnante
conversation, Barbara Bruge nous attend dans son bureau, situé juste
à côté de celui de Philippe Maestrati. Elle s'occupe des
collections moléculaires et nous accorde un peu de son temps pour
nous expliquer en quoi consiste son métier.
Les temps changent, et les nouvelles
technologies ne cessent de faire évoluer le travail des scientifiques.
Récemment, l'étude moléculaire a fait son entrée dans les
laboratoires de recherche sur la biodiversité. Elle permet bien
souvent de différencier des espèces anatomiquement très
semblables. Malheureusement, elle comporte aussi quelques
inconvénients. L'étude moléculaire implique la nécessité de
travailler sur des spécimens vivants, afin de prélever du tissu, le
plus frais possible. On ne peut donc pas étudier un vieux specimen
dont il ne reste qu'une coquille. Le coût d'une étude moléculaire
est élevé et enfin, une collection moléculaire nécessite beaucoup
plus d'espace qu'une collection standard : En effet, pour chaque
specimen, il faut un tube contenant l'échantillon de tissu pour
l'analyse de l'ADN, un tube avec le reste des tissus, la coquille
séchée si elle est présente et enfin les données moléculaires.
Tous ces tubes et toutes ces données doivent ensuite être
identifiés de façon a pouvoir retrouver toutes les pièces d'un
même puzzle.
Tubes résultants de l'étude moléculaire |
Les différentes pièces d'un même puzzle |
Pour ces études, on se base sur un gêne en particulier, le gêne mitochondrial CO1. C'est un gêne maternel, hautement conservé. Il permet de différencier les espèces, c'est ainsi que l'on a découvert qu'Hemilienardia ocellata englobait finalement plusieurs espèces différentes.
Pour établir des relations de parenté
entre plusieurs espèces, on utilise 5 ou 6 gênes différents,
nucléaires et mitochondriaux. L'étude moléculaire n'est pas encore
systématique bien qu'elle soit de plus en plus fréquente.
Nous remercions Barbara pour toutes ces
informations, nous pourrons l'interviewer au besoin le mois prochain.
Les trésors des recoins de ce "grenier" atypique |
Notre matinée dans les locaux s'achève
et Philippe nous donne rendez-vous lundi matin pour la rinçage et le
tri de nouveaux échantillons, ce qui nous permettra d'en apprendre
davantage et de capturer de belles images pour notre reportage.
Prochain rendez-vous lundi 2 novembre.
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